Jusqu'à maintenant, pour faire évoluer une chaîne Hi-Fi classique vers les usages modernes connectés, il fallait soit relier un récepteur Bluetooth - peu onéreux mais limité à une diffusion directe et en qualité restreinte -, soit acquérir une passerelle Wi-Fi spécialisée en audio.
Le choix ne manque pas, notamment chez les fabricants désormais nombreux à proposer des systèmes multiroom (Sonos, Denon, Panasonic, Samsung, Cabasse, etc). Mais l'option la moins coûteuse (AirPort Express d'Apple ou AwoX StriimLink) c'est un ticket à 100 euros minimum. Ou plutôt, c'était, parce que l'arrivée du Chromecast Audio, vendu 39 euros, Wi-Fi et bientôt multiroom, apporte en théorie un grand coup de pied dans la fourmilière. Et dans la pratique ?
Présentation Chromecast Audio
Physiquement, le Chromecast Audio est très proche de son homologue vidéo : c'est un petit module circulaire de 5,2 cm de diamètre pour 1,3 cm d'épaisseur et 30,7 g. Si ce design n'évoque rien de spécial pour le Chromecast, sur la version audio, Google a filé la métaphore du disque en imaginant une finition striée façon vinyle. Le rendu est très sympa, même si on n'est pas amené à contempler l'objet qui finira vraisemblablement caché derrière une chaîne Hi-Fi.Ici, pas de prise HDMI mais une sortie mini jack qui accepte à la fois - mais pas simultanément - de l'analogique ou de l'optique. De base, Google ne livre que le mini jack analogique : pour les câbles RCA ou optiques, il appartient à l'utilisateur de se les procurer.
Le Chromecast Audio s'alimente via une fiche micro USB, Google fournit l'adaptateur secteur. Le câble USB profite d'une bonne longueur (1,75 m), c'est pratique... et ça contraste avec l'appendice mini jack de 14,6 cm. Que reste-t-il à mentionner ? La soucoupe sonnante dispose d'un bouton servant à sa réinitialisation et d'un témoin d'état à LED.
A l'intérieur ? Notre Chromecast Audio de test peut dire merci à aux équipes de iFixit : il échappe à la dissection que nous nous préparions à opérer. Les deux Chromecast ont des composants en commun :
- le contrôleur réseau Marvell Wi-Fi 802.11 ac dual band ;
- le SoC Armada 1500 Mini Plus (de Marvell également) avec processeur double cœur Cortex A7 ;
- la puce Toshiba de mémoire NAND (2 Go pour le stockage du système).
Intérieur du Chromecast Audio, côté pile et face. Crédits photo : iFixit
Le Chromecast Audio se distingue par la présence d'un convertisseur numérique vers analogique (DAC) AKM AK4430 stéréo, gérant les flux en 192 kHz et 24 bits (Google a toutefois limité son module au 96 kHz / 24 bits). Il intègre aussi un amplificateur stéréo Texas Instruments DRV632 de 2 Volt RMS, caractérisé par un rapport signal-bruit supérieur à 90 dB et une distorsion harmonique totale inférieure à 0,01 %. Attention, ce composant n'agit que comme préamplificateur. Il faut donc brancher son Chromecast Audio sur un matériel sonore autonome : enceinte(s) amplifiée(s), amplificateur ou chaîne Hi-Fi. En tout cas, et même si on est loin d'une conception audiophile, on découvre agréablement que la coquille n'est pas aussi vide qu'on pourrait le croire.
Installation et principe de fonctionnement
C'est une des forces du Chromecast Audio : il est aussi simple à installer que le Chromecast normal. Après avoir branché son module, sur secteur et au matériel audio, il suffit d'installer l'application Chromecast sur son smartphone ou sa tablette, Android ou iOS et de se laisser guider. Découpée en trois volets, À l'affiche, Appareils et Applis, l'application va d'abord détecter le Chromecast Audio et proposer d'entreprendre sa configuration. Le smartphone va alors se connecter en direct au Wi-Fi du module, lequel va émettre un son pour que vous confirmiez le bon fonctionnement du dispositif. Il ne reste enfin qu'à communiquer la clé Wi-Fi du réseau domestique pour connecter le Chromecast Audio à Internet et à lui donner un petit nom.Voilà. Et maintenant ? L'application Chromecast recense dans À l'affiche les apps en présence installées sur le smartphone ou la tablette qui sont compatibles avec le Chromecast Audio. Et elle en suggère d'autres. Dans notre cas, Google Play Musique et Spotify apparaissent comme éligibles, mais Napster - qui fonctionne pourtant - ne figure pas dans cette liste. Une application est compatible quand, quelque part au sein de son interface, trône le pictogramme Google Cast : un rectangle avec dans le coin inférieur gauche les trois arcs de cercle représentant les ondes. Dès qu'on touche ce pictogramme, le Chromecast Audio va puiser la musique en Wi-Fi à la source (serveurs du service de musique en ligne), ne laissant au smartphone ou à la tablette que le simple rôle de télécommande.
Ce fonctionnement présente plusieurs intérêts. D'abord, il profite de la bande passante généreuse du Wi-Fi pour streamer en haute qualité, comme en atteste la prise en charge de l'offre Qobuz « qualité CD » en 44,1 kHz et 16 bits sans pertes. Ensuite, il dissocie le smartphone du flux audio : les sons des notifications, les appels ou même un redémarrage du téléphone n'impactent en rien la lecture musicale. Enfin, et c'est une conséquence des deux points précédents, la batterie du smartphone ou de la tablette n'est pas sollicitée, contrairement à ce qu'impose une diffusion directe via Bluetooth par exemple.
L'autre avantage de Google Cast en tant que protocole de diffusion, c'est que l'utilisateur n'a pas besoin de se familiariser avec un nouvel environnement : il continue de faire avec ses applications habituelles. Mieux, le système apporte une continuité dans l'usage : la personne qui écoute Spotify, Deezer ou Qobuz sur son trajet en rentrant du travail peut, dès qu'il arrive au domicile, basculer facilement le son sur son Chromecast Audio.
Possibilités : que demander de plus ?
L'application Chromecast ne sert, à peu de chose près, qu'à la première configuration du module. Il y a tout de même deux entrées intéressantes : le mode invité et le son HDR. Pour ce qui est du son HDR, on n'en sait pas beaucoup plus, sinon que le mode n'est pas adapté aux enceintes d'ordinateurs, de stations d'accueil ou de produits nomades Bluetooth, mais aux systèmes audio haut de gamme, ou du moins Hi-Fi. Et pour cause, le High Dynamic Range se traduit par une augmentation conséquente du volume et de la largeur du spectre reproduit.Il faut donc du matériel capable d'encaisser et de restituer cela proprement. Sur un ensemble Sonos, comme sur une bonne chaîne Hi-Fi, le gain est appréciable, on laissera le mode activé tout le temps. Si vous avez du bon matériel, et notamment un DAC efficace (intégré à l'ampli ou externe), mieux vaut sortir en optique du Chromecast Audio. La sortie analogique n'a pas à rougir, mais on constate une légère perte de volume par rapport à un flux streamé sur la même enceinte via du Sonos, par exemple. Rien de très grave cela dit, la sortie reste très propre.
Le mode invité, quand il est activé, va permettre à toute personne se trouvant à proximité de diffuser sa musique depuis une application compatible Google Cast, sans même être connecté sur le réseau Wi-Fi. Google explique le fonctionnement ainsi : « Lorsque le mode Invité est activé, Chromecast Audio émet une balise Wi-Fi et/ou Bluetooth spéciale -...- Chromecast Audio génère ensuite un code aléatoire à quatre chiffres qui est obligatoire pour caster un contenu en mode Invité. Lorsqu'un appareil à proximité tente de se connecter, Chromecast Audio transfère automatiquement ce code à l'aide de brèves tonalités audio inaudibles. » Le dispositif s'avère parfaitement fonctionnel. Toutefois, en cas d'échec éventuel, l'invité se verrait demander d'entrer le code PIN manuellement.
Et pour les applications qui ne sont pas compatibles Chromecast Audio ? Il reste le mirroring, c'est-à-dire la possibilité de dupliquer l'affichage de son smartphone ou de sa tablette, là, sous Android exclusivement. Dans le cas du Chromecast Audio, seul le flux musical est cloné. En revanche, cette diffusion se fait en Wi-Fi directement du smartphone vers le module, et en temps réel : si on ferme l'application depuis laquelle est lu le contenu, ou si le téléphone reçoit un appel, la lecture s'interrompt. C'est notamment le sort qui est réservé à l'application YouTube, compatible Chromecast vidéo mais pas Chromecast Audio. On se doute bien que Google a imposé cette limitation pour ne pas faire de l'ombre à son propre service de streaming Play Musique.
On peut activer le mirroring depuis l'application Chromecast, ou depuis le menu Affichage --> Diffuser et lire le son de YouTube sur le Chromecast Audio. Il faut laisser la fenêtre YouTube ouverte, sans quoi le son coupe : c'est de la diffusion directe en temps réel.
Il est également possible de caster depuis un ordinateur via le navigateur Chrome, une fois l'extension officielle Cast ajoutée. Si vous utilisez par exemple un logiciel media center du type Plex, vous pourrez transmettre toute votre musique sans fil en local vers le Chromecast Audio. Quel que soit le mode de connexion choisi (via une application Google Cast, en mirroring ou via un ordinateur), le Chromecast Audio se montre toujours ultra réactif et simple à utiliser.
Le fonctionnement multiroom sera pris en charge ultérieurement, via une mise à jour de firmware. En attendant, ceux qui ont un système Sonos peuvent greffer un Chromecast Audio sur une de leurs enceintes, puis choisir « Entrée source locale » dans l'application Sonos : toutes les enceintes seront alors synchronisées au rythme de Google Cast !
Conclusion
Il est difficile de prendre le Chromecast Audio en défaut, sur le papier comme dans la pratique. Il faut dire que Google « n'a eu qu'à » adapter sa formule éprouvée du Chromecast (depuis juillet 2013) au champ spécifique de la musique. Le système est bien ficelé, diablement efficace, supporté par la plupart des grands acteurs et à la portée de toutes les bourses. Difficile de ne pas se laisser tenter quand on est à la recherche d'une solution pour connecter du matériel audio qui ne l'est pas.
Peut-on lui trouver des lacunes ? Disons plutôt des bémols. Pour l'instant le Chromecast Audio n'est pas encore multiroom (ça ne saurait tarder). Par ailleurs, la meilleure méthode de diffusion, celle qui va puiser directement depuis le cloud, est dépendante d'un abonnement à un service de musique en ligne payant, exception faite de Google Play Musique qui permet tout de même de lire sa bibliothèque personnelle (celle envoyée sur les serveurs de Google via Music Manager) hors abonnement. Ceci étant dit, il en va de même avec tous les systèmes Sonos et consorts. Et l'utilisateur peut aussi utiliser son Chromecast Audio pour streamer sa musique en local, gratuitement, via une application comme Plex. L'abonnement à un service type Spotify, Deezer, Napster, Qobuz, Rdio ou encore Google Play Musique n'est donc pas nécessaire, même si c'est assurément un confort.
On regrette également que Google ait précautionneusement écarté YouTube du spectre des applications compatibles, une barrière que l'on peut toutefois contourner avec le mirroring (uniquement sur Android). Des défauts qui n'en sont pas vraiment et qui sont bien peu de chose à côté des nombreuses qualités du Chromecast Audio, à la tête desquelles figure le prix. Un must !